PROPOS RECUEILLIS PAR RAFAEL DUBOURG

Demain soir, l'aventure sera terminée. Que le CA Périgueux soit champion de France de Fédérale 3 ou pas, Thierry Labrousse et une flopée de joueurs quitteront le club ciel et blanc. La faute à une seconde non-montée consécutive (lire nos éditions précédentes) et un climat difficile autour du club. Pour son dernier match sur le banc capiste, le coach, champion de France comme joueur en 1993, se confie.

" Sud Ouest " Vous y voilà, l'objectif final se dessine avec ce dernier match face à Tours.

Thierry Labrousse Dès la première réunion de la saison, c'était l'objectif : aller au bout. Et il n'a jamais été aussi proche. Le dernier mois et demi, on a senti ce déclic arriver après le match retour contre Belvès. Il y a eu une prise de conscience. Nous avons eu quatre matches très compliqués (1). Les joueurs ont pris conscience de leur potentiel.

Vous n'avez jamais douté ?

Si, bien sûr. Qu'on allait monter non, mais qu'on allait aller au bout, oui. Il y a eu un flottement de janvier à mars compliqué à gérer, car la Fédérale 3 est monotone. Ces quatre matches de phases finales d'un niveau supérieur ont déclenché quelque chose. La machine est repartie.

Pourquoi était-ce monotone ?

On gagnait tout le temps, avec des matches trop faciles entre guillemets. Et l'équipe a remis le bleu de chauffe.

Êtes vous satisfait du plan de jeu que vous avez installé dès le début de la saison ?

On prône un jeu du mouvement, avec des séquences avants - trois quarts et pas uniquement l'un ou l'autre. On a retrouvé ça le dernier mois. Ça soulage, surtout avec la canicule : ça permet de créer ce liant entre avants et trois-quarts. Contre Astarac, c'était un gros combat d'avants. Face à Saint-Paul, qui marque le début de notre réveil, on peut très bien perdre. Dimanche, c'était plus basé sur les trois-quarts, ils se sont mis au niveau. Là, pour cette finale, il faudra qu'avants et trois-quarts soient à 100 %.

C'est difficile d'être favoris depuis le début ?

On a fait abstraction. Ce groupe n'est pas resté par hasard. Ils ont remonté ce club deux fois de suite. Puis il y a ces coups de massue des montées refusées. Le cuir est dur. Pour la fin de cette aventure, ils ont décidé de s'écrire une belle page. On a resserré le groupe, il faut du liant, de la cohésion. C'est le même depuis Belvès.

Que vous inspire Tours ?

Comme d'habitude, on a fait abstraction de l'adversaire. On doit juste avoir la même haine vis-à-vis de ce qui peut se produire autour du club. Les joueurs en ont supporté depuis deux ans, on les pique un peu sur ça, " les mal aimés, tout est contre nous, on dérange ". Et c'est la vérité. Si on gagne dimanche, il y aura une grosse explosion. Ce sera la fin de l'aventure pour beaucoup, dont moi, ce serait une belle histoire. Mais le CAP ne mérite pas ce qui l'attend.

Le CAP n'a pas gagné de bouclier depuis 1993. Pourquoi ?

L'an dernier, le groupe était jeune, on a rebâti. Là, on l'a étoffé, on a posé l'objectif d'entrée. Dans les moments compliqués, les joueurs ont mis la barre haut. Notamment contre Astarac. C'était rugueux, costaud et les garçons y ont rajouté la gestion quand on prend le score. Après, le CAP a toujours des hauts, des bas. Ce groupe, à 50 %, ne sera plus là l'an prochain alors qu'un groupe champion, c'est un projet qui dure. C'est le problème du CAP. Ça monte, ça redescend, ça explose... C'est toujours un problème.

Cela vous touche ?

Bien sûr que ça me touche. On est Périgourdin, on est revenu pour s'occuper de la merde. Et même si j'avais déjà décidé d'arrêter, on n'a pas cherché à me garder. En 2009 (2010 en fait, NDLR), je l'avais un peu mal pris. Avec l'arrêt des présidents (Roux et Macary, déjà), c'était portes ouvertes. Là, c'est pareil, depuis deux mois, c'est de l'autogestion. Donc tout le monde ouvre sa gueule, rentre au club...

Pourquoi ne l'ouvrez-vous pas ?

Je n'ai rien à dire. Il y a du respect à avoir. C'est tout ce qu'on demande. Mais on n'en reçoit pas. J'aurai l'occasion d'en parler. Moi, je veux être champion. Car on a vécu deux ans très compliqués, deux ans de galères. Toutes les paroles qu'on entend, tous les dimanches, des insultes... Tous les mecs bossent, sont à respecter. Si nous sommes champions, ce sera une grosse réponse à ceux qui disent que ce groupe n'a pas d'âme... Les retours dans le bus sont extraordinaires depuis un mois, c'est un groupe soudé, qui vit, qui est heureux.

Comment s'est décidé votre départ ?

C'est assez compliqué à dire... J'ai été reçu il y a huit, dix jours et on m'a dit qu'on ne comptait pas continuer avec nous. Moi, dans ma tête, j'avais dit stop depuis un mois. Je sentais qu'il n'y aurait plus de projet. Si on est champion, qu'est ce que je vends à mes joueurs l'an prochain ? Et puis, il y a les gens qui rentrent au club... Pas à la présidence mais...

Vous pensez aux bras droits de Francis Roux ?

Je n'ai rien contre Titi (Thierry Thébault). Mais il y a des tierces personnes avec qui je ne me vois pas travailler. Loïc Netelenbos manager du club, je tombe du lit. C'est la foudre qui tombe sur Périgueux. Ça vole trop bas, c'est compliqué.

Vous continuerez à entraîner la saison prochaine ?

Je serai à plein-temps à Vergt. Je leur ai dit depuis un mois et demi. Mais là, je suis concentré. Un bouclier serait la plus belle des réponses. Avec la manière si possible.

Un dernier mot : la Dordogne a trois clubs en finale. Qu'est ce que cela vous inspire ?

C'est une très bonne chose. Bergerac a su garder un groupe avec de l'expérience, Farmer, Nugent, Jazeix qui est un très bon joueur, Sisombath. Mussidan, avec un groupe que j'ai pu rencontrer, a une belle organisation devant, un gros buteur avec Conte ou Lopez, un centre perforateur : les bases sont là, avec de la cohésion. Et nous, on a fait les bons choix. On ne pouvait pas ne pas aller en quart minimum. Dès que le niveau monte, le département est alimenté. Pas mal de joueurs vont se dispatcher à droit, à gauche, ça va faire monter le niveau.

(1) Le 16e retour contre Belvès, le 8e contre Saint-Paul-lès-Dax, le quart contre Astarac Bigorre et la demie contre Tournefeuille.