Lorsque Bernard Laporte et Thierry Murie m'ont demandé de venir travailler avec eux en 2017, j'avais déjà quelques idées qui avaient germées au fil des rencontres avec les dirigeants de clubs et les bénévoles. Certaines de ses idées, je les considère encore essentielles aujourd'hui pour que le rugby fédéral et les séries puissent continuer à se développer. A l'inverse, je pense que la nouvelle réforme risque d'avoir l'effet contraire.
La nationale qui crée le déséquilibre
Nous allons vite revenir sur la fédérale 1 qui sera splitée en 3 divisions la saison prochaine et qui ne résout en rien les problèmes actuels puisqu'on voit bien que les promus sont systématiquement en bagarre pour le maintien. Créer 2 divisions supplémentaires, resserrées de surcroît, va accroître les besoins financiers afin d'être compétitif et assumer des déplacements plus importants. Y-avait-il un déséquilibre en fédérale 1 ? La réponse est non. Si l'on peut dire qu'il y avait un championnat à 2 vitesses, c'est surtout qu'il y avait 5/6 clubs sur 48 qui étaient plus fort. Est-ce que, dans ce cas, c'est la minorité qui doit imposer les changements ?
Bref, la nationale fut créée avec une conséquence inattendue. Les déséquilibres sportifs se sont produits en Fédérale 1 et Fédérale 2. Et l'on va renforcer cela avec la nationale 2 sur la simple raison d'avoir un statut qui permette de jouer s'il y a une crise quelconque qui stoppe les championnats. Bref, la Fédérale 1 est passée de 48 clubs à 86 clubs en 2 ans.
La fédérale 3 gonflée
La fédérale 3 a elle aussi été dopée avec le passage à 180 clubs au lieu de 168 il y a 2 ans. Là aussi, le bilan est mitigé entre les non promus pour cause de championnat gelé et les invités de la dernière heure, la Fédérale 3 subit la loi de résultats avec des écarts abyssaux entre deux équipes.
D'autre part, le fait d'avoir un championnat asymétrique fait que l'organisation de la phase finale n'est pas spécialement équitable, avec des poules régionales plus ou moins denses et une organisation au niveau national qui n'a plus lieu d'être.
Bref, nous avons donc en 2 ans, vider les séries territoriales de 50 clubs, ce qui est plus que le nombre de clubs Honneur de la ligue Aura qui comporte 4 poules de 10.
La ligue Aura a lancée les 3 divisions territoriales en 2017
La première année de la mise en place de la ligue Aura, j'avais eu la chance de pouvoir participer à la réforme territoriale. Nous avions à l'époque eu l'approbation des clubs pour créer 3 divisions au lieu de 6. Cette idée simple permettait de réduire les déplacements au sein de la ligue et d'avoir plus de clubs dans chaque super division. La première année a eu un bilan assez favorable avec un ajustement pour créer une quatrième division, certaines avançant qu'il y avait trop d'écarts entre des clubs de deuxième série et de quatrième série.
Enfin de compte, je suis heureux que la fédération ait pensée à reprendre cette idée sur laquelle j'avais travaillé avec mon copain Laurent Bourduge, passé chez Ovale Ensemble depuis. Cela va dans la bonne direction. Sauf que :
Il y a un manque de clubs certains en séries
Dans sa nouvelle organisation, la FFR crée trois divisions régionales pour un totale de 960 clubs. J'ai retrouvé un tableau dans lequel j'avais regroupé les nombres de clubs par divisions. A l'époque , les 6 divisions représentaient 1020 clubs soient 60 clubs de plus, ce qui est conséquent à l'échelle locale, puisque cela représente pratiquement 5 clubs par ligue.
En fait, l'idée actuelle est de faire 3 divisions mais avec moins de clubs, et donc, on se retrouve dans la même problématique d'avoir des clubs en Régionale 2 ou 3 qui vont devoir faire plus de kilomètres avec largement moins de moyens qu'en divisions fédérales.
L'un des points abordés était les écarts entre les divisions, là aussi, l'organisation n'est basée que sur un pourcentage de répartition qui va pénaliser les petites divisions. Nous risquons donc d'avoir des forfaits généraux à la rentrée 2022.
Réformette plutôt que réforme
Cette réforme est plutôt une proposition d'ajustement. En fait, nous passons de 11 à 10 divisions en reportant sur les plus basses divisions les problèmes. La fédérale 1 devient une fédérale 3 et la Régionale 3 sera un mix de troisième et quatrième série.
Il faut penser que ces championnats ont besoin d'équipes et de proximités pour vivre. L'un n'allant pas sans l'autre, comment s'en sortir ?
Les réserves à la rescousse
La solution idéale serait de supprimer les réserves et de les transformer en équipes 2 ou de rassemblement. Effectivement, nous touchons à une tradition bien ancrée, mais au détriment de championnats classiques qui ont besoin de renforts. En plus, il y a de plus en plus d'écarts entre les équipes premières et les équipes réserves. Il est peut-être temps de changer la donne.
Nous parlons, potentiellement, de 600 équipes supplémentaires qui pourraient alimenter les championnats classiques. C'est ce qu'il se fait dans les divisions féminines et dans les autres sports. Nous aurions des séries territoriales organisées autour de 1500 équipes sur 3 divisions. Proximité, challenges, derbys, tout y est pour faire avancer la machine.
Dans le cas contraire, j'ai bien peur que les petits clubs jettent l'éponge face à des organisations hasardeuses de championnats en manque de compétiteurs.